Tourbillons

Tourbillons

Étrange sentiment que d’être serein en étant confus, embrouillé et perdu.
Ambivalent paradoxe que d’être plein et vide tout à la fois.
Perplexité que d’être pile et face.

Que l’on aime que la pensée soit claire, nette et précise.

Ciselée et aiguisée comme un sashimi tranché à la scie.
Limpide comme une écriture à la plume sans bavure et égratignure.
Fixée comme un point de couture tenu tel un corset.
Alignée comme des soldats obéissants au garde à vous.
Ordonnée comme des vêtements rangés à la Marie Kondo.

Que l’on aime être rassuré par une pensée simple et manichéenne.
Si c’est pas ça, c’est l’inverse alors !
Que l’on aime être adjuvant ou opposant.
Que l’on aime désigner et classer le bien et le mal.
Que l’on aime le conflit basique avec des ennemis reconnaissables et identifiés.
Si tu n’es pas avec moi, tu es contre moi.
Que l’on aime faire la guerre quand cela nous dépasse.

Que l’on aime se cramponner et s’abriter sous une pensée pragmatique, rationnelle et cartésienne.

Que l’on aime tout ramener, réduire et compresser à de la matière.
Que l’on aime comprendre et expliquer l’invisible.
Que l’on aime poser des questions, tournoyer et philosopher.
Que l’on a besoin de donner du sens.
Que l’on aime être assujetti à notre pensée binaire et conceptuelle.

Quelle tâche ardue que de simplement vivre et se laisser traverser par le flot des contraires !
Une porte s’ouvre...
Plus tu découvres et plus tu t’agenouilles devant la certitude de ton ignorance.
Limpide et complexe est le nuage flou devant toi.

Qu’il est délicieusement terrifiant d’être vivant enchevêtré dans des tourbillons de réalités.
Que l’on ne peut s’empêcher d’aimer un jour et de détester un autre jour une même personne.
Ne décèles-tu pas entre le « Non » et le « Oui », de subtiles nuances montées comme des poupées russes ?
Ta tête ne veut pas mais ton corps révèle l’insolent battement de ton cœur.

Emmitouflé dans un bon gros bloc concret et tangible, tu es un édifice de mille-feuille d’oxymores secrets et mystérieux.
Appliquons-nous assidûment à lâcher ce que l’on croit savoir pour sentir et accueillir ce qui nous échappe.

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