L’eau du puits

L’eau du puits

Une rampe de lancement montée comme un ressort propulse son athlète très haut en l’air,
Ou un acrobate décolle de son marchepied et s’élance telle une fusée dans des pirouettes pyrotechniques ?
La vérité est peut-être double pour le moment en fonction de la perspective.

Le circassien des airs est le pilote de ligne qui fait ses gammes avec son avion de chasse.
Le corps est le bolide enchaînant les loopings réglés au cordeau dans une agilité et une souplesse déconcertante.
Il est la flèche absolument tendue en suspension vers sa destination.
Il est l’eau fluide et glissante qui s’adapte à tout.
Comment être libre dans des mouvements aussi corsetés ?

Car oui ce corps était prodigieusement libre dans un carcan de contraintes.
Les figures étaient imposées mais on eu dit qu’elles étaient la pure invention de l’acrobate,
A croire que ce que l’on connaissait d’elles avant s’effaçait maintenant sous l’image de ce que créait le pilote.

À l’atterrissage, l’athlète se réceptionnait parfaitement sans le moindre chancèlement.
Il venait d’arriver sur Terre: un genoux au sol et l’autre replié, le bout des doigts des mains effleurant le sol avec fermeté, la tête légèrement inclinée vers le bas.
Une révérence en signe d’allégeance ?
Une prosternation pour faire vœu de dévotion ?

La Terre répondait et adoubait cette naissance.
Son sable, ébouriffé par le choc de l’acrobate, se soulevait à son tour en écho dans l’air.
Son sol se craquelait en de petites fissures pour dire qu’il accueillait cette déflagration.
La Terre ne tremblait que pour ouvrir sa porte à cette empreinte,
Alors que l’acrobate apprenait, sauts après sauts, à retomber sur ses pattes avec la précision affûtée du moine Shaolin.
Tout était à sa juste place.

Et du cœur de ses entrailles, la Terre nourrissait l’athlète qui sentait de la vie pousser en lui.
Ses racines, à l’inverse de descendre dans les profondeurs, remontaient vers le haut jusqu’à la pointe de ses cheveux.
Des lianes qui s’enracinent vers le ciel comme l’eau cristalline que l’on fait remonter du puits.

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