Ouvert

Ouvert

J’ai peur de me tromper. Je suis indécis. 
Je ne sais pas. Quoi choisir ? Comment trancher ?
Nuage de confusion, boussole instable, poudreuse de brouillard.
Je reste ouvert.

J’ai peur de me faire avoir. Je suis retenu.
Vais-je être jugé, manipulé, trahi ?
Armure sous haute tension, doudou de barricades, camisole d’illusions. Je reste ouvert.

J’ai peur de moi. J’ai peur de vous.
J’ai peur de nous.
Identité, dualité, altérité.
Je reste ouvert.

J’ai peur de ne pas être à la hauteur. Je suis amputé.
Scarifications d’inaction ou courage du petit pas ?
Je reste ouvert.

J’ai peur de ne pas réussir à pardonner.
Repliée en boule, cachée dans une fissure, logée dans le caniveau de mes égouts, une perfide colère froide et muette monte la garde.
Une petite rancœur lancinante comme un os à ronger.
Ma gangrène de poison.
Je reste ouvert.

J’ai peur de manquer d’humilité.
J’ai peur d’avoir envie de retenir l’indicible.
J’ai peur de vouloir prolonger l’impermanence sous perfusion.
J’ai peur de m’illusionner.
Je reste ouvert.

J’ai peur d’être triste. Je ne veux pas souffrir.
Tentative d’esquive, puis de fuite.
Sauve qui peut ! Branle-bas de combat pour s’exfiltrer !
J’ai peur de lutter contre l’inconfort qui me veut du bien.
Je reste ouvert.
J’ai peur de les voir partir.

Je ne veux pas qu’ils aient mal. Comment rester à côté d’eux ?
Je reste ouvert.

J’ai peur qu’ils m’oublient. J’ai peur d’effacer.
Comment accueillir la vieillesse ?
Je reste ouvert.

J’ai peur de me dépouiller encore et encore.
J’ai peur de boire la tasse et de stagner sous l’eau.
J’ai peur de grandir et de m’éveiller.
Je reste ouvert.

J’ai peur de suffoquer en mourant.
Aspiré par le cyclone. Ventousé par l’extinction.
Je reste ouvert.

J’ai peur de rentrer à la maison.
J’ai peur de devenir ma maison.
Chemin de retour du plein dans du vide.
Je suis espace.
Je reste ouvert.

J’ai peur de regarder ma peur.
Impuissant. Je suis radicalement impuissant.
Je reste ouvert.

J’ai peur d’aimer. Je suis vulnérable.
Ai-je déjà véritablement aimé ?
Suis-je capable d’aimer l’autre tel qu’il est maintenant, sans attendre qu’il change ?
Je reste ouvert.

J’ai peur de perdre mon indépendance.
J’ai peur de me sacrifier.
J’ai peur de ce qui n’est pas encore là.
Je reste ouvert.

J’ai peur de mon désir.
J’ai peur que notre étreinte soit irréelle.
J’ai peur de l’alchimie.
J’ai peur de ce qui parait bien trop magique.
Je reste ouvert.

J’ai peur de la beauté de la vie.
J’ai peur d’être heureux et de tout bousiller.
J’ai peur de ne pas savoir rire de mes névroses et de mes drames par grande tempête.
Je reste ouvert.

J’ai peur du changement, des transformations et des mutations.
J’ai peur du cycle de la vie.
J’ai peur de vivre.
Je reste ouvert.

J’ai peur d’être un être humain.
Libre. Je suis profondément libre d’enchanter ma vie.
Je reste ouvert.

J’ai peur de ma folie.
Azimuté, détraqué, déglingué d’abimes et d’ombres.
Je reste ouvert.

J’ai peur de ma puissance.
Incassable, indomptable, infini de bonté et de lumière.
J’ai peur de guérir.
Je reste ouvert.

Puis-je embrasser mes inconnues ?
Je reste ouvert.

« Laisse-toi faire par ce qui est là. C’est le plus grand cadeau que tu puisses te faire. »

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