Les mots du silence

Les mots du silence


J’avais envie de crier, mais je n’y arrivais pas. J’avais envie de rire, mais je n’y arrivais pas. J’avais envie de me lever, mais je n’y arrivais pas.
Seules des larmes arrivaient à s’échapper de mes yeux et je ne savais pourquoi, si ce n’est que j’étais cuite et essorée.
Nous restâmes tous les six en silence.
De longues minutes en silence sans bouger.
Personne n’avait envie de parler et personne n’avait envie de partir non plus. Alors, nous restâmes en présence, sans mots.
Nous ne voulions pas nous quitter ou nous voulions laisser s’étirer ce bardo de silence et continuer à communier ainsi ensemble.
Ce temps suspendu était un pur délice, car j’en mesurais avec humilité son caractère si transitoire et périssable.
Je le sous-pesais pour m’embaumer de sa fragrance magique.
La parole était éjectée. Un nouvel espace s’ouvrait. Une étrangeté reposante et déroutante à la fois.
La délectation de sentir que le cadeau que l’on vit va bientôt partir et que sa beauté réside en grande partie en cela.
Laisser s’évaporer le ravissement.
Je regardais ce chemin de plus en plus simplement et je m’apercevais alors que j’avais laissé tomber ma démarche en crabe. Vaine tentative pour contrecarrer l’éclat de la béatitude et protéger mon cœur au moment de s’en séparer.
Que de labeurs que de s’ouvrir, accueillir, respirer et vivre à pleins poumons puis se détacher !
Que de labeurs que de laisser s’évanouir ce qu’on aime.

Des mots, toujours des mots.
Là, les mots m’apparaissaient creux et inessentiels.
Je crois bien que ce fut un régal que de rester les uns à côté des autres sans chercher à combler notre silence. Je dis « je crois bien », car ces quelques minutes brouillent ma vision rationnelle et revêtent l’atmosphère du rêve.
Nous étions déboussolés, mais bel et bien pleins de vie. 


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